🎅Le best-of des fêtes de fin d'@nnée
Retour sur Google Street View, un texte de Jean Baudrillard sur les machines, Alice Zeniter, des feux de cheminée et de la cuisine dans une maison de poupée pour célébrer les fêtes de fin d'année.
Puisque cet envoi est prévu pour le 24 décembre, et anticipant qu’aucun autre ne serait fait avant 2021, je me suis dit qu’il faudrait faire quelque chose de spécial.
Après sept numéros, je vous propose une sélection de liens, des retours sur les précédents envois, en espérant vous proposer suffisamment de pépites pour tenir jusqu’à l’an prochain.
Au menu donc : Google Street View, ASMR, mini-kitchens et animations de Noël, entre autres. Et en attendant la nouvelle année, vous pouvez aussi suivre arobase sur Instagram ou Twitter. Bonnes fêtes de fin d’année !
Visites sur Google Street View
En zonant sur Google Street View à l’occasion du sixième numéro d’arobase, j’avais un peu trop pensé à moi, en me cherchant partout. Et puis, j’ai lu un article. Bill Frankel raconte comment il a rendu visite régulièrement à son père, après sa mort, grâce à Google Street View. Celui-ci tond, en effet, sa pelouse en 2007, alors que passe la « Google car ».
J’ai depuis changé de stratégie et j’ai exploré Google Street View à la recherche de mes proches. Ces captations ont en plus une sensation particulière : les personnes sont souvent surprises par la voiture, elles ne se sont pas spécialement apprêtées, les photos semblent volées, les visages sont floutés. On ne reconnaît finalement l’autre que si on le connaît vraiment bien.
J’ai trouvé ma grand-mère jardinant au pied de chez elle, en juillet 2008. J’ai aussi retrouvé des traces d’un voyage : en 2018, un prestataire avait capturé la terrasse d’un café dans un village toscan, où je m’étais attablé, avec plusieurs ami·es.
J’ai identifié des ancien·nes collègues attablé·es au restaurant ou marchant dans la rue. J’ai traîné comme ça sur Street View, comme quand on essaie de tomber « par hasard » sur une connaissance… Et je sais maintenant que je pourrai retourner sur Google retrouver ces gens.
Et vous, avez-vous retrouvé des proches sur Google Street View ?
Cuisiner dans une maison de poupée
Si Gabrielle Stemmer s’est intéressée aux ménagères américaines dans le cadre de ses films – dont nous parlions dans le cinquième numéro d’arobase – elle nous a également confié être fascinée par d’autres étrangetés présentes sur Youtube, dont le « mini cooking ».
Il ne faut pas avoir de problème avec la vision d’ongles de près : le concept de ces vidéos est de réaliser des plats, dans des mini-cuisines avec des mini-ustensiles. Une découverte très relaxante, puisqu’il n’y a aucune parole, simplement de la musique et qu’on se passionne pour ces petits aliments qui se comportent comme des grands.
Le site Tastemade compte ainsi seize saisons de Tiny kitchen. La chaîne a été inspirée par la popularité de ce genre de vidéos au Japon. Vous pouvez aussi pénétrer dans des maisons de poupées pour cuisiner, avec Walking with giants, Jenny’s Mini Cooking Show ou Hamstaurant, qui prépare ces mini-plats pour des hamsters.
Pause Baudrillard
« Les textes, images, films, discours, programmes issus de l'ordinateur sont des produits machiniques, et ils en ont les caractéristiques: artificiellement expansés, liftés par la machine, les films truffés d'effets spéciaux, les textes truffés de longueurs, de redondances dues à la volonté maligne de la machine de fonctionner à tout prix (c'est sa passion à elle) et à la fascination de l'opérateur pour cette possibilité illimitée de fonctionnement. »
Écran total, Jean Baudrillard, Libération, 6 mai 1996
Des expériences chuchotées
Caroline Delieutraz, une artiste dont nous avons déjà parlé, nous a recommandé une vidéo assez particulière : « Je séquestre mon abonné », un jeu de rôle de kidnapping réalisé par Dodo ASMR. L’ASMR (autonomous sensory meridian response, en anglais) est une sensation, agréable pour certain·es, encouragée par les vidéos chuchotées et bruitées.
L’occasion d’ailleurs de recommander des productions récentes, partagéess sur les réseaux sociaux : une reproduction chuchotée de plusieurs « grands moments médiatiques » avec des personnalités politiques. Ou encore un clash tiré des Anges de la téléréalité, toujours en ASMR.
Être une autrice sur internet
À l’occasion de notre échange avec Alice Zeniter, paru la semaine dernière, celle-ci nous a raconté comment internet modifiait la pratique de l’écrivain :
Je suis une écrivaine de l’ère Internet. J’ai accès à une quantité astronomiques d’articles en ligne, de pages Wikipedia, des images pour suppléer à mes souvenirs quand ils me font défaut. Je peux écrire un email à tel ou telle spécialiste d’un sujet si je doute. Je peux envoyer un tapuscrit de mon livre sans avoir peur qu’il s’égare. Ça m’offre des facilités considérables. Mais il faut aussi composer avec le fait que ça entraîne des risques d’éparpillement et de déconcentration…
C’est assez fréquent qu’ à la fin d’une journée d’écriture, je regarde avec stupeur l’historique de mes recherches de la journée et je constate que je me suis un peu égarée. Ce n’est pas tant qu’un lien mène à un autre, c’est que – certains jours – si je commence à douter d’une information que j’avais écrite (une date, un type d’arbre présent dans une description, un objet dont je ne suis plus sûre qu’il ait réellement été inventé à l’époque, etc), je vais douter de la suivante puis de celle d’après. Très rapidement, je commence à douter du sens-même d’un mot et j’ouvre le TLF vingt fois.
Feu de cheminée
Dans le dernier numéro de sa newsletter très recommandable Links I Would Gchat You If We Were Friends, Caitlin Dewey écrit sur la tradition de la vidéo de feu de cheminée, bien pratique pour égayer un repas de fête. Si celle-ci a été inventée par une télévision locale en 1966, son utilisation a explosé à la faveur de l’arrivée de Youtube et autres plateformes de streaming vidéo. Le son des craquements a sûrement à voir, puisqu’on parlait d’ASMR…
Elles existent dans des formats variés, avec une version « animaux de compagnie » et musique de fête, une version réalisée par le syndicat d’initiatives de Floride, à base de feu sur la plage ou encore dans un luxueux chalet, avec neige de rigueur. L’an dernier, Le Monde revenait, en vidéo, sur le succès de ses vidéos de feu de cheminée.
Noël archivé
Dans le troisième numéro d’arobase, nous parlions de la fin de Flash, qui se rapproche à grand pas, puisqu’il ne sera plus supporté début janvier 2021. Cela pose des questions de conservation.
Rhizome est revenu sur les différents moyens d’émulation existant pour continuer à savourer encore les animations et jeux Flash dans quelques jours. Dragan Espenschied, responsable de la conservation chez Rhizome suggère de documenter les œuvres d’art en Flash avant sa disparition, en décrivant le fonctionnement précisément, et l’environnement de fonctionnement, et en capturant l’apparence de l’œuvre. Cela permettra ensuite d’ajuster autant que faire se peut l’émulateur, pour se rapprocher de l’œuvre originale.
Dans le but d’engranger un peu d’argent pour proposer leur propre émulateur, l’organisation propose dès le 1er janvier, à minuit, heure de Paris, un téléthon avec un best-of de créations Flash. L’invitation cite notamment la prière-poème de Thanksgiving, adressée aux outils technologiques, réalisée par Jason E. Lewis et Skawennati Tricia Fragnito.
Claude Closky est un artiste contemporain dont une partie des œuvres est en ligne. Noël fonctionnait grâce à Shockwave de Macromedia et n’est donc plus accessible. L’artiste Nicolas Frespech, dans une récente Papillote, racontait comment, pour conserver l’œuvre, un internaute l’avait filmée pour ensuite la proposer sur Youtube. Une façon de vous souhaiter de joyeuses fêtes de fin d’année. Rendez-vous début janvier.
📣 On parle de nous
Sur Twitter, l’artiste Albertine Meunier a fait un petit tweet pour vous inviter tout le monde à s’abonner à arobase. Merci à Albertine et faites comme elle : n’hésitez pas à parler d’arobase et à en dire du bien à vos proches. 💞 Meilleurs vœux.